Un constat alarmant pour la Syrie

Actuellement plus de 80 % des Syriens vivent en dessous du seuil de pauvreté et 90 % de la population dépend de l’aide humanitaire. Tous les citoyens sont touchés de la même manière mais la plupart des chrétiens vivent dispersés dans tout le pays ce qui fragilise encore plus les communautés chrétiennes. La fin de la chrétienté en Syrie à l’horizon 2060 serait possible.

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Kathrin Visse, Nabil Antaki, Amer Kassar et Peter Fuchs, directeur de CSI-Allemagne, en discussion sur l’avenir de la Syrie à l’Académie catholique de Berlin. csi

 

À l’invitation de CSI, un médecin syrien et un ecclésiastique de l’Église syrienne catholique ont parlé à Berlin des conditions de vie actuelles en Syrie. Le constat est bouleversant : la population sombre dans la pauvreté. Les chrétiens restants sont confrontés à un avenir incertain.Depuis un certain temps, les armes se sont tues dans la majorité de la Syrie. La guerre est en grande partie terminée. Mais la situation humanitaire est pire que jamais pour les Syriens. C’est ce qu’ont rapporté d’Alep le Dr Nabil Antaki, médecin syrien et responsable d’une organisation partenaire de CSI (Les Maristes Bleus), et de Damas Mgr Amer Kassar, ecclésiastique catholique, à l’Académie catholique de Berlin.

En plus de la guerre, la pandémie du Covid-19, une épidémie de choléra et le grave tremblement de terre de février 2023 ont notamment contribué à la situation catastrophique des habitants de la Syrie. Surtout les sanctions contre le pays empêchent la reconstruction et la reprise nécessaire de l’économie syrienne.

Une inflation galopante

Entre-temps, les pays voisins, la Turquie et le Liban, veulent renvoyer les réfugiés syriens dans leur pays. Mais qu’est-ce qui les y attend ? De nombreuses maisons sont détruites et les prix ont massivement augmenté alors que les salaires restent en grande partie les mêmes pour ceux qui en ont un. Ils seraient actuellement plus de huit fois supérieurs à ce qu’ils étaient en 2020. Un exemple : nourrir un bébé avec du lait infantile avec un revenu moyen d’environ 25 euros par mois est déjà une dépense mensuelle supérieure au revenu. Le pain et l’essence sont rationnés. L’électricité est limitée à deux heures par jour.

Les sanctions entravent le système de santé

Il n’est donc pas étonnant que, selon les données actuelles, plus de 80 % des Syriens vivent en dessous du seuil de pauvreté. Le 90 % de la population dépend de l’aide humanitaire. Même les soins dans les hôpitaux ne sont possibles pour beaucoup qu’avec le soutien d’organisations humanitaires internationales. Et bien que les besoins médicaux soient exclus des sanctions internationales contre la Syrie, de nombreux fabricants occidentaux craignent des difficultés avec leurs propres autorités et, par précaution, ne livrent pas en Syrie où, selon le journal télévisé allemand, « 41 % des hôpitaux publics ne sont pas ou que partiellement opérationnels ».

Si des opérations chirurgicales nécessaires sont prévues, les malades doivent quémander l’aide de plusieurs organisations afin de réunir l’argent nécessaire aux frais. « Une vie digne n’est guère possible dans ces conditions, souligne Nabil Antaki à plusieurs reprises. La situation de l’approvisionnement est actuellement perçue par la plupart des Syriens comme pire que pendant les combats. »

Plus de chrétiens à partir de 2060 ?

Des 10 % de citoyens chrétiens que comptait la Syrie avant la guerre, la minorité religieuse s’est réduite à tout juste 2 %. Dans les communautés chrétiennes, il est donc de plus en plus difficile de transmettre la foi. « Il ne manque pas seulement la relève des prêtres, mais aussi de jeunes adultes qui pourraient par exemple diriger des groupes de scouts ou donner des cours de religion », explique Mgr Kassar.

L’ecclésiastique dresse un tableau très sombre de l’avenir des Églises chrétiennes en Syrie. Il considère les estimations qui prévoient la fin de la chrétienté en Syrie d’ici 2060 comme possibles si l’évolution reste inchangée. « Cela modifierait fortement le tissu social du pays, alors que jusqu’à présent, les chrétiens, les musulmans et les autres communautés religieuses vivaient en grande partie en harmonie. »

Les sanctions encouragent l’émigration

Tant Nabil Antaki qu’Amer Kassar rapportent que les chrétiens ne souffriraient pas plus que les autres : tous les citoyens subissent de la même manière la situation actuelle. Cependant, la plupart des chrétiens ne vivent pas dans de grandes communautés localisables au niveau régional, mais sont dispersés dans tout le pays. Cela rend difficile une vie paroissiale régulière tout comme une cohabitation étroite et solidaire.

Une solution rapide n’est pas en vue. « Seule la réintégration de la Syrie au sein de la communauté internationale et la levée des sanctions, lourdes de conséquences pour la population, permettraient une reconstruction et un retour régulier des expatriés ainsi que l’arrêt de la vague d’émigration », explique Nabil Antaki.

« Alors que les jeunes rêvaient autrefois de bons métiers et de fonder leur propre famille, ils ne pensent plus aujourd’hui qu’à une chose : quitter le pays le plus vite possible », ajoute Mgr Kassar. Ce n’est malheureusement pas une perspective réjouissante pour la Syrie.

Karsten Beck, CSI-Allemagne

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